- Le Parti libéral dirigé par Mark Carney formera le prochain gouvernement du Canada. Ce parti a raflé 169 des 343 sièges au Parlement, soit trois sièges à peine de moins que le nombre de sièges prévu pour la majorité. Il a été talonné par le Parti conservateur de Pierre Poilievre, qui a remporté 144 sièges; le chef du parti a quand même perdu sa propre circonscription.
- Le Parti libéral devra s’en remettre au soutien des tiers partis considérablement amoindris, puisque le Bloc québécois et le NPD ont obtenu respectivement 22 et sept sièges. Généralement, les gouvernements minoritaires durent peu de temps au Canada; or, il se pourrait que la barre soit moins haute, puisqu’il ne faut au Parti libéral que trois autres votes pour faire avancer ses priorités jugées tout aussi urgentes pour les autres partis.
- Les déficits plus importants que prévu pourraient constituer la rançon des alliances à nouer, mais le gouvernement pourrait décider de défendre sa position, puisque les partis qui tirent de l’arrière ne sont guère intéressés à revenir aux urnes avant longtemps.
- Le Parti libéral a fait campagne en misant sur un ambitieux programme de dépenses totalisant 129 G$ en nouveaux engagements, compensés par des économies de 52 G$, ce qui augmente en chiffres nets de 83 G$ les impératifs budgétaires sur quatre ans. Le Bloc québécois et le NPD ont présenté des plateformes encore plus ambitieuses, avec des plans de revenus tout aussi vagues.
- Il est évident que les finances resteront déficitaires. Dans son plan, le Parti libéral projette cette année un déficit de 2 % du PIB, qui plonge à 1,4 % sur quatre ans. Il s’agit essentiellement de 0,5 point de pourcentage de plus que le référentiel préélectoral, et l’écart pourrait se creuser encore pour atteindre 1 point de pourcentage complet si on actualise prudemment les économies attendues. Les plans budgétaires se détériorent plus rapidement si le pays connaît une récession modérée (graphiques 1 et 2).
- Les chiffres hypothétiques qui sous‑tendent ces prévisions sont énormes. Plus de la moitié des économies planifiées s’expliqueraient par des gains d’efficience essentiellement indéfinis, alors que le plan lui‑même est fondé sur des perspectives économiques plutôt timides. Il est aussi prématuré de juger si — ou comment — un gouvernement minoritaire peut être appelé à dépenser pour nouer des alliances. Ce qu’il faut sans doute se demander, c’est dans quelle mesure les libéraux pourraient s’acquitter de leur mandat avant que les Canadiens soient reconvoqués aux urnes.
- Selon nous, les ambitions sont valables. Le plan du Parti libéral vise à hausser d’un demi‑millier de milliards de dollars sur cinq ans les investissements infrastructurels dans l’économie canadienne en misant sur les deniers publics, tout en affrontant une conjoncture d’investissements chroniquement imprévisible. La tâche ne sera guère facile : les structures‑cadres administratives et institutionnelles sont compliquées, ce qui rend le travail encore plus complexe sans majorité.
- Pour l’heure, la plupart des facteurs — mondiaux et nationaux — laissent au moins entendre orientationnellement que la croissance pourrait être plus léthargique, que les déficits pourraient se creuser et que le coût des emprunts pourrait augmenter. La solidité des fondamentaux pourrait ne pas constituer une valeur sûre pour le Canada aujourd’hui; or, le fléchissement des fondamentaux pourrait dégrader encore la situation. Un gouvernement minoritaire dysfonctionnel court le risque de scier la branche sur laquelle il est assis.
- Le premier ministre doit s’attendre à un travail ardu et doit probablement prévoir de nouer éventuellement des alliances pour chaque enjeu. Les Canadiens resteront en mode de veille électorale à l’heure où le pays manœuvre dans un paysage mondial particulièrement tumultueux.

LA FIN DE LA PARTIE
Le Parti libéral dirigé par Mark Carney a été couronné vainqueur des élections qui ont eu lieu au Canada le 28 avril. Le Parti libéral a raflé 169 des 343 sièges parlementaires, soit à peine trois sièges de moins que les 172 qu’il faut compter pour être majoritaire. Les libéraux ont été talonnés par les conservateurs, qui ont mobilisé 144 sièges; le Bloc québécois et le NPD se sont inscrits beaucoup plus loin derrière, en remportant respectivement 22 et sept sièges (tableau 1). Mark Carney avait convoqué des élections peu de temps après avoir été élu chef du Parti au début de mars dans la foulée de la démission de Justin Trudeau. Dans les cinq semaines qui ont suivi, les tensions avec les États-Unis se sont multipliées, et l’avance des conservateurs a fondu comme neige au soleil. Or, l’avance des libéraux n’était pas assez grande pour leur apporter la majorité des sièges, de sorte que Mark Carney continuera de marcher sur des œufs.

Au Canada, les gouvernements minoritaires ont tendance à avoir une courte espérance de vie. Ils doivent s’en remettre au soutien des autres partis pour rester au pouvoir, et la plupart durent moins de deux ans (graphique 3). Le récent gouvernement minoritaire faisait partie des rares exceptions, ce qui lui a coûté très cher du point de vue budgétaire, puisque les libéraux ont dû conclure avec le NPD un accord de soutien et de confiance qui a eu pour effet de déployer depuis 2021, entre autres, les programmes de soins dentaires et de médicaments.

Le premier ministre devra réunir des appuis chemin faisant. Or, le Bloc est un parti uniprovincial qui est moins susceptible de s’aligner sur des intérêts plus vastes, et le NPD a été décimé, de sorte que ses sept élus ont maintenant le statut de députés indépendants. L’inconvénient, c’est que les conservateurs n’ont pas obtenu assez de votes pour défaire le gouvernement sans l’aide de ces partis en déconfiture, ce qui laisse entendre qu’une coalition formelle serait moins probable qu’une alliance pour chaque enjeu.
Pour l’heure, nous adoptons l’hypothèse selon laquelle le premier ministre Mark Carney avancera décisivement pour faire progresser le programme dont fait état sa plateforme; toutefois, dans un gouvernement minoritaire, nous n’irions guère plus loin que la prochaine année ou les deux prochaines années, puisqu’il est probable que les Canadiens soient reconvoqués aux urnes avant cette échéance.
LA CONFRONTATION
On s’attend à ce que le gouvernement libéral entre tout de suite dans le feu de l’action malgré ces autres vents contraires. En l’espace de quelques semaines, le discours du trône exposera un programme plus vaste, qui cadrera avec la plateforme du Parti. Un budget suivrait avant l’été, pour mettre en branle les priorités les plus pressantes. Les plans de dépenses de la première année de la plateforme laissent entrevoir les premières mesures chiffrées à plus de 35 G$ dans l’exercice financier 2026, ce qui laisse entendre que le budget à court terme sera chargé (et qu’il en ira de même de l’énoncé économique de l’automne).
On s’attend aussi à ce que le premier ministre Carney s’inscrive dans la file d’attente des négociations avec les États-Unis. Sur fond de menaces commerciales brandies puis annulées ou reportées, le président Trump a repoussé jusqu’après les élections les négociations avec le Canada. La renégociation accélérée de l’ACEUM constitue probablement le point de départ. Le premier ministre Carney a jusqu’à maintenant adopté une approche pragmatique, en instituant des contre‑tarifs ciblés par rapport à ceux imposés par Donald Trump. Dans son plan, il s’engage à mieux soutenir, à court et à moyen terme, les entreprises et les travailleurs pénalisés par cette guerre commerciale, en s’engageant aussi à supprimer les obstacles fédéraux contre le commerce intérieur et à muscler l’aide apportée à la diversification du commerce externe.
Le premier ministre devra dans le même temps mettre en équilibre ce qu’il y a d’urgent et d’important dans le court terme. L’économie du Canada était déjà plongée dans une crise de productivité qui le consumait lentement avant que Trump déclenche la guerre commerciale, qui menace d’accélérer le déclin du train de vie. Dans sa plateforme, Mark Carney s’engage à hausser les investissements, la productivité et la croissance pour enrayer cette crise. Il doit aujourd’hui probablement manœuvrer adroitement dans une conjoncture politique divisée en deçà de nos frontières.
LANCER LA RONDELLE EN FOND DE TERRITOIRE
Sur papier, ce plan devrait muscler la croissance à plus long terme. L’objectif consiste à mobiliser sur cinq ans des investissements de 500 G$ en avançant 150 G$ de fonds publics. Près des deux tiers des engagements de la campagne sont liés aux investissements. Les mesures proposées laissent entendre qu’il faudrait réunir environ 25 G$ par an (0,75 % du PIB) pour assurer la formation du capital. Les plans d’infrastructures sont décaissés en amont alors que les marchés publics de l’État — dont le relèvement des investissements militaires — le sont en aval (graphiques 4 et 5). Il faut amoindrir les attentes sur l’impact des programmes d’incitation supplémentaires pour les investissements des entreprises puisque la grande majorité des investissements en dollars correspond à la contrepassation des plans destinés à hausser l’impôt sur les gains en capital — ce qui pourrait vouloir dire qu’on veut préserver le statu quo.

Le gouvernement entend aussi améliorer le paysage des investissements du Canada en priorisant les secteurs des ressources naturelles. La plateforme double les crédits d’impôt existants sur les investissements dans les technologies propres (après quelques mises au point) et prévoit un examen plus vaste de la fiscalité des sociétés; or, c’est la réduction de l’incertitude et des inefficiences qui décourage les investissements du secteur privé qui apporterait les dividendes réels. Les mesures proposées consistent entre autres à accélérer les « projets d’intérêt national » en mettant en place un « guichet unique » pour prendre les décisions à l’échelle fédérale et pour promouvoir le principe d’« un projet, une évaluation » avec les autres paliers de gouvernement (qui seront disposés à le faire). Or, le plan est vague en raison des questions brûlantes qui ont ponctué la campagne, dont le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier et l’engagement d’adopter d’autres politiques pour veiller à ce que « les gros pollueurs paient ». C’est au gouvernement qu’il appartiendra d’assurer la cohésion des politiques dans un paysage complexe, malgré les pouvoirs de coercition limités. L’ampleur des signaux pour les investissements des entreprises et un parcours plus lisse pour les parties prenantes constitueront les vrais critères.
Il serait présomptueux de comptabiliser tous les effets économiques de la plateforme dont le risque le plus évident est la courte espérance de vie d’un gouvernement minoritaire. Or, même les alliances les plus adroites justifieraient des mises en garde. Il faut encore adopter les politiques, les projets liés aux infrastructures sont d’une lenteur notoire dans la structure‑cadre complexe des différentes administrations du Canada, et les projets liés à l’énergie sont encore plus incertains dans un environnement très polarisé. Les investissements du gouvernement fédéral risquent de faire fuir les autres investissements, du secteur privé ou des autres gouvernements. Ceci dit, le multiplicateur budgétaire des plans déclarés devrait être assez élevé et pourrait améliorer, dans le moyen terme, le potentiel de croissance du Canada. Le fléchissement des perspectives économiques laisse entendre que les impacts pourraient être encore plus retentissants, en réduisant le risque de compromis sur la politique monétaire (tableau 2).

Il y a toujours très peu, dans le plan, de mesures de relance de la demande à court terme ciblant les ménages. La plateforme est fondée sur de timides perspectives économiques, avancées par le DPB au début de mars, avant l’escalade des tensions commerciales. La mesure signature pour le portefeuille des ménages correspond à une baisse d’impôts généralisée — soit une réduction de 1 point de pourcentage de la fourchette de l’impôt sur le revenu le plus faible —, ce qui ferait rejaillir des avantages sur tous les contribuables. On lancerait cette baisse le jour de la fête du Canada : on a prévu cette année une provision de 4,2 G$. Cette mesure fiscale régressive n’atteindrait guère que ceux qui ont une plus forte propension à dépenser dans une période de repli plus brusque, et il est probable que la plupart des ménages en soient privés lorsqu’on soldera la nouvelle répartition plus progressive de la remise canadienne sur le carbone — dont les derniers chèques sortiront à la mi‑avril. La hausse temporaire de 1,1 G$ du Supplément de revenu garanti serait un bon point de départ; or, il n’atteindrait pas l’ampleur potentiellement nécessaire dans la voie à suivre.
Toutes ces mesures ne nous amènent pas à nous précipiter pour modifier nos prévisions économiques actuelles. Notre compte rendu du milieu du mois, arrimé à une détérioration plus brusque de la conjoncture au sud de la frontière (entre autres facteurs) prévoyait déjà une réaction des politiques budgétaires de l’ordre de 1 % du PIB au Canada, essentiellement répartie entre les mesures de la demande à court terme et les investissements dans la colonne de l’offre. On a essentiellement adopté une hypothèse par rapport aux résultats portés par notre modèle, qui laissent entrevoir un programme de relance budgétaire temporaire de l’ordre de 2,5 % du PIB pour compenser les vents contraires qui soufflent actuellement sur l’économie. Nous visons essentiellement juste avec les investissements de la colonne de l’offre; or, les mesures liées à la demande justifient une approche attentiste. À défaut d’une désescalade importante de la guerre commerciale mondiale, la politique budgétaire est probablement appelée à jouer un rôle plus important dans la réaction des politiques du Canada — si Équipe Canada peut se rallier derrière cette intervention.
UNE DÉFENSIVE DE ZONE
On s’attend à ce que le plan fédéral du Canada pour le logement soit à nouveau relevé. Or, les attentes sont amoindries. La plateforme apporte encore quelques outils dans le plan d’action, notamment une nouvelle entité — Maisons Canada — dont l’objectif consiste à « ramener le gouvernement dans le secteur de la construction résidentielle », en finançant des prêts à hauteur de 25 G$ pour offrir sur le marché des logements préusinés. Le gouvernement offrira aussi d’autres mesures d’incitation fiscale pour les investisseurs multirésidentiels et des congés de TPS pour les primo‑accédants, de concert avec une baisse des redevances d’aménagement (en contrepartie d’un meilleur financement des infrastructures). Le délai prévu pour la construction d’un demi‑million de nouveaux logements par an a été étendu à un horizon de 10 ans; or, il s’agit toujours d’un objectif exceptionnellement ambitieux, compte tenu des contraintes de la réalité et des compromis à consentir.
Les plans d’immigration sont essentiellement appelés à garder le cap… mais en apportant aussi une mise au point pour ce qui est des délais. L’engagement déjà adopté pour porter à 5 % de la population totale, d’ici 2026, le nombre de nouveaux résidents temporaires a été prolongé jusqu’en 2027, alors que la croissance annuelle de la population des résidents permanents serait plafonnée à moins de 1 % de la population globale par la suite. Ces nouvelles projections cadrent avec nos hypothèses actuelles, compte tenu des récentes tendances, puisque la croissance de la population devrait se chiffrer à 1 % en 2025 et à 0,5 % en 2026, avant de replonger aux niveaux statistiques d’un peu moins de 1 %.
LES PLANS D’ACTION
Le coût de la plateforme du Parti libéral est chiffré à une somme nette de 83 G$ sur quatre ans (77 G$ en excluant les remboursements incrémentiels de la dette). Les nouvelles dépenses brutes se montent à 129 G$ dans une liste vertigineuse de plus de 110 mesures, même si les trois quarts des dépenses nouvelles sont concentrés dans une douzaine de mesures (graphique 6). Le Parti comptabilise des mesures de compensation budgétaires de 52 G$, dont 20 G$ en recettes tarifaires cette année, 4 G$ en durcissant la perception fiscale, et la généreuse somme de 28 G$ apportée par les « économies découlant d’une amélioration de la productivité gouvernementale », qui seront rehaussées dans les années ultérieures.

Il serait prématuré de miser tout de suite sur ces économies. Les mesures proposées font intervenir un ensemble de programmes de regroupement des services, de fusionnement des subventions, de réduction du recours aux experts‑conseils externes et de promotion de l’intelligence artificielle. Les transferts — aux ménages et aux autres paliers de gouvernement — sont hors de propos pour l’instant, ce qui représente la moitié du total des dépenses du gouvernement. Le gouvernement plafonnerait (sans les abaisser) les effectifs de la fonction publique, en contingentant la hausse des dépenses annuelles directes des programmes à 2 %.
On ne connaît pas vraiment non plus la mesure dans laquelle les autres priorités du Parti pourraient avoir une incidence sur le programme d’un gouvernement minoritaire. Le Bloc et le NPD ont tous deux proposé des plateformes budgétairement expansives. Le NPD a promis d’engager des dépenses nouvelles de 134 G$, contre de nouvelles recettes de 92 G$, alors que la facture de la plateforme du Bloc sur quatre ans totalisait 107 G$ de dépenses contre 77 G$ de recettes (graphique 7). Le NPD en particulier n’est guère en mesure de négocier, ayant perdu son statut de parti officiel et son chef. Mais dans l’ensemble, cette situation renforce orientationnellement l’expansion budgétaire, puisque plus personne ne préconise l’austérité budgétaire à la table des négociations, alors qu’il y a une multitude d’engagements en instance.

Le gouvernement prévoit à dessein d’engager des déficits plus considérables en exprimant un parti pris pour des déficits encore plus importants. La plateforme du Parti prévoit un déficit de 2 % du PIB (62 G$) cette année, et ce déficit baisserait légèrement pour atteindre 1,4 % (48 G$) d’ici l’exercice financier 2029. Il s’agit essentiellement de 0,5 point de pourcentage de plus que le référentiel préélectoral, ce qui se rapprocherait de 1 point de pourcentage complet si on actualise prudemment les économies attendues. Le plan ajouterait presque 2,5 points de pourcentage à la dette nette (à 42,7 % du PIB) d’ici l’exercice financier 2029 par rapport au référentiel du DPB (graphiques 1 et 2 de la première page). Les frais de la dette incrémentiels sont estimés à 5,6 G$ — en supposant que le cours des obligations à 10 ans du GdC s’établit à 3,50 % environ —, ce qui porterait les frais de remboursement de la dette en pourcentage du PIB à plus de 2 % du PIB dans un scénario timide. (Bien entendu, dans le graphique 8, il faut plisser les yeux pour voir la différence; la « hausse » est toutefois le maître mot.)

La Parti s’engage à déposer un nouveau budget « opérationnel » équilibré d’ici 2028. Ce principe permettrait de comptabiliser les mesures qui portent la formation du capital — ou « tout ce qui permet de construire un actif » comptabilisé directement dans le bilan du gouvernement ou dans d’autres bilans — aux côtés du déficit du capital. (Le déficit de synthèse correspondrait à la somme du nouveau déficit opérationnel et du déficit en capital.) La plateforme laisse entendre qu’on est à l’aise d’engager un déficit de capital de l’ordre de ~50 G$ (de 1,5 % à 2 % du PIB) par an. On attend les détails; or, sur la plateforme, on estime que le gouvernement dépense déjà 1 % pour les investissements liés au capital, alors que la plateforme enchaîne avec le solde (graphique 9). Rien n’indique comment on pourrait comptabiliser les recettes inattendues — ce qui offre l’occasion d’adopter une marge de contre‑cyclicité dans ces nouveaux garde‑fous —, ce que le plan ne note pas dynamiquement.

LA STRATÉGIE DE LA RÉSERVE
Il n’y a probablement pas assez de mesures d’aide comptabilisées à court terme pour tenir compte du fléchissement de la conjoncture économique. Il s’agit d’une approche saine pour la plateforme d’un parti politique; or, les plans sont remaniés dans les récessions. Si les perspectives se détériorent encore, il ne serait pas déraisonnable d’ajouter un autre point de pourcentage ou deux au résultat final dans le court terme. Le premier ministre a déjà manœuvré dans des crises antérieures, et l’on s’attend à ce qu’il tente d’arrimer la demande en faisant appel à des leviers budgétaires justifiés par la conjoncture économique, compte tenu essentiellement des contraintes à plus court terme (et à moyen terme) de la politique monétaire dans le contexte actuel.
Le Canada a la marge de manœuvre qu’il faut pour intervenir dans un fléchissement plus brusque de l’économie; or, cette marge (auprès des marchés) pourrait être restreinte. La dette nette du gouvernement général est toujours positionnée favorablement par rapport aux pays comparables; toutefois, la dette brute — plus pertinente en période de stress comme quasi‑indicateur de la liquidité — est plus modérée, et son économie est plus exposée au commerce (graphiques 10 et 11). Le gouvernement fédéral n’a que la moitié environ de l’ensemble de l’encours de la dette du gouvernement, et un certain nombre de provinces subissent des pressions en raison des récentes mises en garde des agences de notation. On pourrait s’attendre à ce que le gouvernement souverain porte une plus grande part de l’intervention budgétaire ultime dans un fléchissement plus brusque de l’économie, comme il l’a fait pendant la pandémie.

LA VRAIE MISE EN JEU
Le premier ministre s’est fait préparer le terrain. Il hérite d’un fléchissement économique en raison de l’incertitude de la conjoncture et des vents contraires essentiellement exogènes que font souffler les politiques. Il sera sur la sellette, puisqu’il devra négocier un parcours plus lisse pour l’économie largement tributaire du Canada, dans laquelle la règle du jeu n’est pas parfaitement claire. Dans le même temps, il tâchera de mener d’ambitieuses réformes structurelles en deçà de nos frontières afin d’amoindrir les dommages potentiellement permanents que subira l’économie canadienne. Le succès dépend d’un modèle aspirationnel de fédéralisme budgétaire coopératif dans la foulée d’une élection qui a étendu à l’ensemble du pays une vaste polarisation. Le succès dépend aussi de la motivation des entreprises à miser énormément sur le Canada malgré l’incertitude nouvelle. Et il devra le faire même s’il est privé de la majorité.
Le pays ne peut pas se permettre de s’asseoir sur ses lauriers, encore moins de laisser des dysfonctionnements internes s'installer. Le premier ministre a raison de viser haut; or, il a réduit la possibilité de faux pas dans l’application des politiques. Il faudrait aussi mobiliser les autres partis fédéraux afin d’aider le pays à manœuvrer dans un esprit de collaboration dans une époque particulièrement tumultueuse. Le référentiel laisse entrevoir un fléchissement de la croissance et des besoins en emprunts plus grands dans un environnement dans lequel le loyer de l’argent pourrait augmenter. Il y a un risque vraisemblable de détérioration rapide et en ordre dispersé. Un ensemble cohérent de politiques de valorisation de la croissance devrait constituer un objectif pour mobiliser tous les partis politiques dans les prochains mois.
On sort les coudes, on baisse la tête et on garde les yeux ouverts. Et le premier ministre devra parfois passer la rondelle pour marquer des buts.
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